« Combattre ou cultiver » : Les dilemmes d'agriculteurs canadiens

Le problème était en effet : produire des vivres depuis le Canada en demeurant sur ses terres ou aller combattre en Europe? Par Mourad Djebabla


« Lorsque la Grande-Bretagne déclara la guerre à l’Allemagne le 4 août 1914, alors même que les centres urbains démontraient bruyamment leur patriotisme, les campagnes canadiennes furent moins démonstratives. À l’été 1914, les agriculteurs étaient d’abord préoccupés par leurs récoltes à rentrer. En tant qu’aire de production, le monde rural n’en fut cependant pas moins concerné par les hostilités en tant que source d’approvisionnement en denrées des combattants outre-mer.

« Dominion de l’Empire britannique, c’est de facto, de par son statut colonial, que le Canada fut inclus dans la lutte par sa métropole. Cette réalité coloniale ne l’empêcha pas de s’impliquer activement dans l’effort de guerre impérial en répondant tant aux besoins militaires, qu’économiques et alimentaires de la Grande-Bretagne. Avant 1914, le Canada constituait déjà une source d’approvisionnement du marché britannique.i Le principal lien du temps de paix qui unissait d’ailleurs le Dominion à sa métropole était agraire, ce que symbolisèrent les « cadeaux » que le Canada et chaque province firent aux Britanniques au début des hostilités, comme les un million de sacs de farine du gouvernement fédéral en plus des 500 000 de l’Ontario, ou encore les 4 millions de livres de fromage du Québec.ii

« Chez les Alliés, le scénario d’une guerre courte s’effaçant progressivement après septembre 1914, la mobilisation de l’agriculture s’effectua parallèlement à celle du reste de l’économie.iii Pour la Grande-Bretagne, les ressources de ses colonies et dominions devaient être exploitées à son profit. Durant la guerre de 14-18, par sa situation géographique, le Canada (et plus largement l’Amérique du Nord) fut mis à l’avant-scène pour le ravitaillement de la Grande-Bretagne alors confrontée à la pression de la guerre sous-marine allemande. Dans ce contexte, par des politiques nationales de surproduction entre 1915 et 1918, les autorités fédérales encouragèrent les producteurs agricoles à continuer de répondre aux besoins du marché intérieur, tout en produisant plus pour combler les demandes d’outre-mer.

« Pour les autorités britanniques, le Canada devait fournir tant des hommes que des denrées, et la presse rurale canadienne se fit l’écho de ce devoir attendu des agriculteurs de cultiver plus afin que le Canada fût à même de répondre aux besoins de sa métropole. En octobre 1914, le journal du Comté de Beauce, L’Éclaireur, reproduisit un extrait du Westminster Gazette dans lequel les autorités de Londres faisaient valoir leurs attentes à l’encontre du Canada : « Nous sommes fiers des troupes que le Canada nous envoie, mais nous attendons aussi de lui le blé qui, l’année prochaine, sera encore plus nécessaire pour notre sécurité nationale.iv » Du point de vue des campagnes cependant, le rapport à l’effort de guerre n’était pas si simple. Le problème qui se posait était en effet de savoir à quel devoir répondre : produire des vivres depuis le Canada en demeurant sur ses terres ou, comme les agents recruteurs enjoignaient les Canadiens de le faire, rejoindre les rangs du Corps Expéditionnaire canadien pour aller combattre en Europe?

« Dès août 1914, la rhétorique développée dans la presse rurale fut de soutenir et de nourrir les soldats, dessinant ainsi un devoir spécifique pour les agriculteurs depuis leurs champs, au contraire de la presse des villes appelant à la mobilisation de tous pour soutenir au front les armes de l’Empire.v La question de servir au front n’était pas vue d’un bon œil depuis les campagnes qui souffraient déjà de l’exode rural depuis la fin du XIXème siècle. Dès le 13 août 1914, face à une rumeur circulant en Beauce et voulant que tous les hommes fussent envoyés à la guerre, L’Éclaireur rassura ses lecteurs en précisant qu’au Canada, le recrutement se ferait sur la base du volontariat et que le devoir qui incombait aux agriculteurs était de cultiver.vi Le Ministre fédéral de l’Agriculture les réconforta dans cette approche avec sa première campagne pancanadienne de surproduction de 1915 : Patriotism and Production. Celle-ci, en incitant les agriculteurs à augmenter à tout prix la production de blé au Canada pour nourrir la Grande-Bretagne, rendait leur place indispensable aux champs ! Mais cette définition du rôle à jouer des agriculteurs au pays ne fut pas pour autant acquise aux yeux de tous, et en particulier pour les autorités militaires devant combler (eux aussi à tout prix) leurs bataillons. Tout au long du conflit, en dépit des politiques annuelles de surproduction du ministère fédéral de l’Agriculture, des agents recruteurs parcoururent les campagnes canadiennes. Cette pression alla d’ailleurs en s’intensifiant au regard des objectifs du gouvernement fédéral d’augmenter toujours plus le nombre de combattants à fournir au Corps Expéditionnaire canadien. Après les premiers 30 000 volontaires de l’été 1914, le 29 octobre 1915, Robert Borden fixa l’objectif à 250 000 hommes, puis à 500 000, en janvier 1916.vii Au regard des difficultés accrues des officiers à combler leurs rangs dans les seuls centres urbains, la pression s’accentua sur les campagnes dès 1915.

« Dans les faits, au-delà des différences régionales et culturelles, les agriculteurs canadiens furent dans l’ensemble peu enclins à s’enrôler. En 1916, ils ne représentaient que 8,5% des engagés volontaires.viii En tout, de 1914 à 1918, sur les 600 000 hommes du Corps Expéditionnaire canadien, 100 000 étaient des agriculteurs.ix Avec la brochure Nos volontaires sous les armes, le journal montréalais La Presse répondit aux accusations de la presse urbaine ontarienne selon laquelle le Québec ne faisait pas son devoir en démontrant qu’au contraire de l’Ontario, la population québécoise canadienne-française demeurait majoritairement agricole. Or, comme en Ontario ou en Saskatchewan, les agriculteurs préférèrent demeurer sur leurs terres et profiter de la manne du conflit tout en faisant leur « devoir ».x

« L’enrôlement d’un agriculteur avait en effet des conséquences importantes pour son exploitation, au contraire d’un citadin qui pouvait aisément être remplacé à l’usine ou au magasin (souvent par des femmes). Pour s’enrôler, un jeune agriculteur devait au contraire laisser sa ferme en location ou aux soins d’un voisin, ce qui pouvait engendrer des incidents, comme en témoigne la lettre d’un soldat saskatchewannais de retour du front à l’été 1918 :

« This place has been uncultivated since 1914; on joining the Army, Aug. 1914, I obtained a promise from a neighbour to rent it during my absence, on the usual terms. He, however, failed to do so, without notifying me, then overseas, of this failure on his part; and on my return I find the place very considerably grown up with weeds.xi »

« Il y avait aussi les dépenses que l’exploitation occasionnait, ce qui impliquait de produire pour pouvoir faire face aux créances, et donc de rester à exploiter ses terres. Dans le premier Corps Expéditionnaire, ce furent ainsi les chômeurs des villes, trouvant là une occasion d’échapper à leur sort, et des immigrants britanniques ayant conservé un lien étroit avec la Grande-Bretagne, qui s’enrôlèrent en nombre en 1914.xii

« Alors même que la campagne fédérale Patriotism and Production battait son plein, les récoltes en cours de l’été 1915 ne dissuadèrent pas les agents recruteurs de visiter les campagnes, comme en témoigne un article du Saskatoon Phoenix au sujet de la levée du 65e bataillon. Même si l’officier reconnut la difficulté de recruter en cette période de l’année consacrée aux travaux des champs, et alors même que la moitié de son bataillon se prévalut d’une permission pour faire les récoltesxiii, le recrutement devait aller de l’avant.xiv Pour les récoltes de 1915 en Ontario, même The Globe reconnut l’impact négatif que le recrutement pouvait avoir sur les moissons avec le manque de bras que cela occasionnait.

« De leur côté, focalisés sur les unités à combler, les agents recruteurs se plaignaient du peu d’intérêt des agriculteurs à soutenir l’armée canadienne, comme l’exprima un officier dans le Comté de Simcoe (Ontario) : « I was surprised when at home the other day to learn that recruiting had practically come to an end in Barrie, and that no young men were offering for active service. (...) Are the young men afraid of hardship or of being shot? (...) Wake up boys! » Le constat était identique en Saskatchewan pour le recrutement du 53e bataillon en zones rurales.xvii Dans ce contexte, à l’automne 1915, le Ministre de la Milice décréta que dans les comtés ruraux, le recrutement se ferait dorénavant localement et non plus par unités à combler, ce qui donna naissance aux « bataillons ruraux ».xviii Des agents recruteurs parcoururent alors les campagnes québécoises et ontariennes à l’aide de trains pour intégrer les fermes les plus éloignées à l’effort de guerre en hommes.xix Parmi les unités rurales levées, citons le 178e bataillon, recruté dans les Cantons de l’Est, et le 153e bataillon levé en majorité à Guelph, en 1916.xx Le 15 août 1916, après l’expérience du recrutement local qui ne changea guère la donne, le gouvernement fédéral mit en place des Directeurs de recrutement (Chief Recruiting Officers) à la tête de chaque district militaire. Il s’agissait de mieux structurer la levée d’hommes face à la baisse continuelle des volontaires.xxi Le nombre de nouvelles recrues passa en effet de 32 705 en mars 1916, à 8 675 en juillet de la même année.xxii À partir de 1916, la pression fut aussi plus importante par l’implication d’associations patriotiques. Mais avec l’objectif du gouvernement d’élever toujours plus la barre du nombre de recrues pour le Corps Expéditionnaire canadien, des voix s’élevèrent dans le monde financier, comme le président du Pacifique-Canadien, Lord Shaughnessy, qui conseilla de garder au pays la main-d’œuvre agricole encore disponible.xxiii Selon The Globe, c’est à partir de 1916 que la question de l’impact du recrutement sur la main-d’œuvre agricole se fit sentir. Dans le milieu rural, chaque nouvelle recrue était une aide en moins pour les récoltes, ce qui avait un impact sur le niveau et la qualité de la production.xxiv

« Les associations d’agriculteurs pressèrent le gouvernement fédéral de prendre en considération ce problème dans sa politique de recrutement, ne serait-ce que pour garantir le succès des campagnes de surproduction. Par exemple, en février 1916, à l’issue de la deuxième convention annuelle du United Farmers of Ontario à Toronto, une résolution fut prise et diffusée dans la presse rurale ontarienne. Elle rappelait la place des agriculteurs aux champs pour contribuer à soutenir les armes de la métropole, ce que le recrutement remettait en cause. À l’Ouest, en février 1916, à l’occasion de la convention annuelle de la Saskatchewan Grain Growers’ Association, dans une approche discursive, le président J. H. Maharg démontra que les besoins de l’Empire en vivres imposaient aux agriculteurs un devoir de produire. Leur place était donc retenue aux champs. Sans pour autant remettre en cause le recrutement et à l’exemple des agriculteurs ontariensxxvi, J. H. Maharg appelait à trouver des sources de recrutement autres que celles des campagnes, notamment en mobilisant les travailleurs d’industries jugées comme non-essentielles.xxvii

« En juillet 1915, L’Éclaireur du Comté de Beauce faisait valoir que le Canada avait fourni assez d’hommes pour l’outre-mer et qu’il convenait à présent de favoriser le soutien de l’effort de guerre depuis le Canada avec une production agricole placée sur le même plan que celle de munitions.xxviii Cette position n’était guère différente de celle des agriculteurs canadiens-anglais et faisait écho à celle des nationalistes canadiens-français, et en particulier d’Henri Bourassa. Pour ce dernier, plutôt que de le vider de sa force vive, le Québec pouvait pleinement contribuer au conflit avec ses industries et son agriculture. Dès septembre 1914, il avait d’ailleurs mis en garde le gouvernement canadien d’éloigner sa main-d’œuvre agricole en l’envoyant outre-mer.xxix En décembre 1914, Henri Bourassa avait provoqué un incident en exprimant ce point de vue lors d’une conférence à Toronto. À un moment où l’attention de la Ville Reine était tournée vers le recrutement, il affirma que la production agricole devait dominer. Cette vision nord-américaine de la contribution à la guerre en Europe exprimait le point de vue des campagnes :

« (…) le 17 décembre 1914, au milieu d’un tapage systématique et qui durait depuis une heure, M. Bourassa lisait ces mots : « Il n’y a que quelques semaines que l’un des principaux journaux de Londres, la Westminster Gazette, était obligé de nous rappeler que nous pouvions rendre un meilleur service à la mère-patrie et à l’Empire en produisant du blé qu’en levant des soldats », que l’estrade fut envahie par un groupe de soldats brandissant l’Union Jack et la réunion brutalement interrompue.xxx

« Si cette approche fut mal reçue en 1914, elle s’imposa cependant au fur et à mesure du conflit. Dans un contexte canadien où l’effort de guerre agricole et le recrutement de nouvelles unités étaient simultanément appliqués, un problème de cohérence apparaissait. Comment le gouvernement fédéral pouvait-il laisser l’un et l’autre de ces devoirs suivre leur cours sans prendre de mesures pour les hiérarchiser? Ce problème ira en s’imposant pour être exacerbé au moment de la conscription. Certains agriculteurs ontariens ne comprenaient tout simplement pas la position de leurs gouvernements fédéral et provincial qui, d’un côté, leur demandaient d’augmenter leurs productions et, de l’autre, les exhortaient à s’enrôler.

« Pour justifier leur position à l’égard du recrutement, les agriculteurs s’appuyaient sur les politiques du gouvernement fédéral qui les enjoignaient d’augmenter la production agricole pour soutenir l’Empire. Sur cette base, ils se justifièrent en prétendant que ceux qui restaient au Canada avaient un devoir spécifique à assumer pour soutenir l’effort de guerre. Pour ce faire, les publications gouvernementales des années 1915-1916, et en particulier l’Agricultural War Book du Ministère de l’Agriculture qui fixait les objectifs à atteindre, les aidèrent à faire la charge de la preuve à demeurer sur leurs terres. Les campagnes fédérales de production agricole ne faisaient-elles pas des vivres une arme à même de combattre l’ennemi? En Saskatchewan, au cours de la campagne fédérale de surproduction Production and Thrift de 1916, le Saskatoon Phoenix fit part d’un incident où des agriculteurs refusèrent catégoriquement de s’enrôler en s’appuyant sur les attentes que le Ministre de l’Agriculture plaçait en eux.xxxi

« Depuis les villes, cette attitude fut interprétée comme une preuve de ce que l’intérêt personnel primait sur le sacrifice.xxxii Dans le cas de l’Ontario, R. Matthew Bray remarque que si les centres urbains furent la principale source de recrutement, ils s’attendaient à ce que les campagnes en fissent autant.xxxiii The Globe critiqua très tôt le peu d’empressement des agriculteurs à rejoindre les rangs.xxxiv Dans un article en date du 22 janvier 1915, il demanda même aux campagnes de faire montre de plus de patriotisme à l’égard de l’Empire en revêtant l’uniforme : « Is rural Ontario losing its Imperial spirit? (…) Will the rural regiments allow the city regiments to put them to shame?xxxv » Pour un citadin, la quiétude apparente des campagnes donnait l’image d’un monde déconnecté du conflit et il pouvait ressentir une certaine jalousie face à une moindre implication apparente des agriculteurs dans le Corps Expéditionnaire canadien. Ce fossé résultait de ce que les citadins, soumis à la pression des agents recruteurs dans leur quotidienxxxvi, pouvaient ne pas (vouloir) comprendre l’importance que revêtait la nécessité de produire des vivres, tant martelée dans la presse rurale.

« À l’opposé, les ruraux n’apprécièrent guère ce genre d’accusations. Le 22 août 1916, le Canadian Military Gazette publia la lettre d’une fermière. Elle y dénonçait un article dans lequel les cultivateurs avaient été représentés comme peu enclins à s’enrôler afin de profiter plutôt de la manne de la guerre. Les agriculteurs des profiteurs de guerre? Pour elle, cette accusation taisait leur patriotisme réel dans les œuvres de guerre, le travail des femmes aux champs pour combler le manque de travailleurs, et les besoins « vitaux » de la Grande-Bretagne qui imposaient aux producteurs d’y répondre.xxxvii Si le monde rural ontarien pouvait avoir un patriotisme moins démonstratif que les villes, les agriculteurs n’en demeuraient pas moins loyaux envers l’Empire. Depuis le monde rural, il apparaissait que si le devoir des agriculteurs était de produire, il revenait aux villes de faire leur devoir en fournissant les hommes pour le front.xxxviii Ce malentendu entre les agriculteurs et les autorités militaires fut accentué au moment de la conscription.

« Au Canada, c’est d’abord la question des tensions ethniques qui marque l’historiographie de la conscription, notamment avec les heurts occasionnés au Québec, au sein de la communauté canadienne-française. Mais elle fut aussi caractérisée par une prise de position du monde rural.xxxix La loi de la conscription au Canada s’imposa au regard du contexte international et militaire sur le front occidental. En 1917, la situation des Alliés pouvait paraître délicate : guerre sous-marine à outrance, effondrement du front oriental avec la reddition de la Russie, sanglant échec de l’offensive franco-britannique du printemps 1917, pertes canadiennes importantes lors de la victoire de Vimy, et volonté des Allemands d’en finir avec le front occidental avant l’arrivée massive des soldats américains entrés en guerre en avril.

« Au regard de cette situation, le nombre de nouvelles recrues canadiennes, en baisse depuis au moins 1915, ne permettait plus de combler les pertes du front. Par exemple, en avril 1917, après la bataille de la Crête de Vimy, avec des pertes évaluées à 13 477 hommes, le nombre de nouveaux volontaires n’était que de 5 530.x1 Pour 1917, avec des pertes totales estimées à 129 890 pour le Corps d’Armée canadien, le recrutement n’avait permis de fournir que 64 139 nouveaux soldats.

« Le 18 mai 1917, quatre jours après son retour de la conférence impériale à Londres, Robert Borden annonça au Parlement son intention de recourir à la conscription pour soutenir les troupes canadiennes.x1ii Le projet de loi fut déposé le 11 juin, ouvrant une longue période de débats. La prise de position du monde rural contre cette mesure vint rendre les débats plus complexes que n’avait pu l’imaginer Robert Borden en dépassant la simple opposition culturelle entre Canadiens français et Canadiens anglais.x1iii Du point des agriculteurs, cette mesure venait renforcer le problème qu’avait pu déjà causer la pression des agents recruteurs sur le monde rural en drainant hors de leur portée les bras nécessaires pour les travaux agricoles. Ces préoccupations furent exprimées à la Chambre des communes par leurs représentants lors de la période des débats sur la proposition de loi. En deuxième lecture, le chef de l’opposition libérale, Wilfrid Laurier, disposant alors d’un fort soutien dans les Prairies, proposa de recourir au référendum, à l’exemple de l’Australie, mais sa motion fut rejetée. La loi fut adoptée en troisième lecture le 24 juillet 1917, devenant force de loi le 29 août suivant.x1iv

« Le journal Ottawa Citizen critiqua le gouvernement canadien pour ne pas avoir pris en compte la question de la force vive utile au Canada pour les industries et l’agriculture.x1v Au contraire, la presse urbaine proche du gouvernement reconnaissait l’importance de recourir à la conscription avec le contexte militaire et elle était confiante que le gouvernement ferait la part des choses entre ceux utiles aux pays et au front.x1vi Ce fut surtout dans le monde ouvrier et agricole que les critiques fusèrent, milieux qui avaient pu se montrer réticents à s’enrôler. Du point de vue des ouvriers, la conscription provoqua des réactions vives avec des manifestations souvent violentes dans les centres urbains et industriels, en particulier au Québec et en Ontario.x1vii En règle générale, si les réticences des agriculteurs furent moins visibles et spectaculaires, la presse rurale se fit l’écho de leurs inquiétudes. Pour le monde agricole, l’impact de la conscription sur la capacité des agriculteurs à produire fut le principal argument exploité pour dénoncer la loi. Pour justifier son opposition à la conscription, le monde rural tenta de préserver une image de « légalité » à sa démarche. Il s’agissait de dessiner les contours d’une action qui se faisait non pas pour le seul intérêt des agriculteurs, mais au nom de celui national et supranational commandant de ravitailler la métropole et ses alliés. Dans le contexte agricole, la mise en application de la loi fut repoussée à la mi-octobre pour permettre aux agriculteurs de terminer les récoltes de l’été 1917. Ce fut donc surtout pour les semailles et les récoltes de 1918 que la loi pouvait avoir un impact sur la production.

« Pour le gouvernement canadien, afin de démontrer qu’il ne perdait pas de vue l’importance qu’avait la production agricole, plutôt que de retenir la solution d’une exemption en masse des agriculteurs, il s’appuya sur les tribunaux d’exemption. Eux seuls devaient régler la question en fonction de l’utilité reconnue ou non de l’agriculteur sur sa terre.x1viii En 1917, 1 387 tribunaux locaux d’exemption furent mis en place. Ils étaient composés de deux membres, un désigné par une Commission parlementaire de sélection et l’autre par un juge de comté ou de district. Leurs décisions pouvaient être soumises à l’un des 195 tribunaux d’appel composés d’un juge nommé par le juge en chef de la province. Enfin, les décisions en appel pouvaient ultimement être soumises au tribunal central des appels dont la décision était définitive.x1ix

« Situés au niveau local, les tribunaux d’exemption devaient rendre des verdicts en connaissance des conditions qui prévalaient dans leur juridiction. Ils pouvaient être en mesure de prendre des décisions sur la nécessité ou non de garder des individus jugés comme indispensables à l’économie locale et, par extension, à celle nationale.1 Au sujet des motifs d’exemption, toutes les catégories de travailleurs étaient prises en compte, ceux tant du monde rural qu’industriel et commercial.1i Selon les autorités fédérales, en février 1918, la majorité des exemptions avaient été accordées à des agriculteurs, tandis que la majorité des appels venaient d’individus prétendant pouvoir aider à la production agricole.1ii D’après les chiffres officiels, en 1918, sur les 161 981 agriculteurs qui demandèrent une exemption, seuls 20 449 se la virent refuser.1iii Pour ce qui est du nombre total d’exemptions accordées par les tribunaux, fin 1917, sur les 404 395 conscrits concernés par la Loi du Service militaire, 380 510 demandèrent d’être exemptés, laissant seulement 24 000 conscrits disponibles.1iv Au total, fin 1917, sur les 380 510 demandes d’exemptions, 278 779 furent accordées.1v

« Des décisions de tribunaux furent néanmoins remises en cause. Dans les Prairies, des agriculteurs se plaignirent que certains eurent refusé des exemptions alors même que les conscrits étaient indispensables sur leurs fermes.1vi Plus largement, John Herd Thompson remarque l’agacement des Canadiens anglais des Prairies à voir des tribunaux si rigides pour accorder des exemptions. Cet agacement se nourrissait du fait qu’aux yeux de l’Ouest, les tribunaux semblaient moins durs dans les districts canadiens-français ou au Québec.1vii

« Ceux des agriculteurs qui échouaient à obtenir une exemption devaient tout laisser. Le 6 janvier 1918, le Ministre de l’Agriculture de la Saskatchewan écrivit au Ministre de la Milice pour lui faire savoir que dans sa province, l’administration de la Loi du Service Militaire faisait en sorte que nombre de jeunes agriculteurs conscrits devaient sacrifier leurs équipements ou bétails dans des ventes aux enchères. De ce fait, sur un ton alarmiste afin de bien faire mesurer les effets néfastes de la conscription pour les campagnes, le Ministre de l’Agriculture brandit la menace que nombre de terres demeureraient non cultivées. Cependant, la seule réponse obtenue du Ministre de la Milice fut de laisser les tribunaux d’exemption juger de chaque cas.1viii

« Une fois les récoltes de 1917 rentrées et perturbées par les démarches à faire auprès des tribunaux d’exemption, le 13 octobre 1917, les hommes conscrits de la classe 1 (célibataires et veufs de 20-34 ans sans enfants) reçurent l’ordre de se reporter aux autorités militaires avec comme date limite pour le faire, le 10 novembre. En ce qui concerne les attentes des autorités, le Ministre de la Milice demanda d’abord 25 000 conscrits, puis 10 000 par mois.1ix Ce ne fut qu’à partir du 3 janvier 1918, après les élections fédérales du 17 décembre 1917, que les 20 000 premiers conscrits furent appelés aux casernes. Certains refusèrent de se présenter, amenant alors le gouvernement fédéral à les traquer.

« Les agriculteurs furent de plus en plus mécontents de ne pas avoir été exemptés en masse, alors qu’ils avaient pu placer de grandes attentes dans les tribunaux compris comme devant reconnaître leur part prise dans l’effort de guerre. Confronté à des récriminations qui s’intensifièrent et à une menace de voir une baisse de la production en 1918, sans compter le contexte des élections fédérales de décembre 1917 et des difficultés accrues des Alliés sur le plan alimentaire, le gouvernement canadien dut prendre position. Le 12 octobre 1917, Robert Borden mit en place un Gouvernement d’Union pour marquer l’unité des partis et du pays à poursuivre la guerre en soutenant notamment la conscription. À l’occasion de la campagne électorale fédérale de novembre-décembre 1917, le gouvernement canadien céda du leste aux agriculteurs. Tandis que le Ministre fédéral de l’Agriculture leur assura qu’il n’était pas dans l’intention du gouvernement d’ôter des champs les hommes expérimentés aux travaux agricoles1x, le 24 novembre, le général Mewburn, Ministre de la Milice, fit une promesse qui calma le monde agricole. C’est en Ontario qu’il prit position où, lors d’un discours prononcé devant des électeurs ruraux de Dundas, il annonça qu’une exemption serait accordée à tous les fils d’agriculteurs et aux travailleurs agricoles expérimentés afin de préserver cette ressource pour les semailles et les récoltes de 1918. Il s’engagea aussi à revoir les jugements de refus d’exemption les concernant.1xi

« Cette promesse fut retenue dans le milieu rural comme le « Mewburn Pledge ». À partir de ce moment, le président du Conseil du Service militaire instruisit les tribunaux d’exemption de prendre en considération le cas des agriculteurs.1xii Le 2 décembre 1917, cette promesse devint loi avec un Ordre en Conseil qui accorda des exemptions aux jeunes agriculteurs et aux travailleurs agricoles.1xiii Le Ministre fédéral de l’Agriculture dépêcha dans les comtés ruraux des représentants de son ministère pour encadrer les agriculteurs voulant faire appel et obtenir leur exemption.1xiv Cette prise en compte de l’agriculteur fut appuyée par un exemple concret : celui d’un jeune agriculteur ontarien, W. H. Rowntree, qui obtint son exemption du tribunal d’appel le 8 décembre 1917. Ce jugement fit jurisprudence en reconnaissant qu’il devait demeurer sur sa ferme en tant que seule aide disponible pour son père âgé et son jeune frère pour cultiver 150 acres proches de Weston.1xv Le jugement du juge Lyman P. Duff, de la cour suprême, fut publié dans l’ensemble de la presse canadienne.1xvi La diffusion fut faite sous l’autorité du Directeur de l’information publique, organe officiel canadien de propagande instauré en 1917. Au moment des élections fédérales, la publication de ce jugement fut une stratégie de communication qui devait démontrer la prise en compte des agriculteurs par le Gouvernement d’Union. Il s’agissait de calmer la grogne dans le monde rural pour éviter de le voir basculer du côté des Libéraux de Wilfrid Laurier qui faisaient campagne contre la conscription. Si le Québec pouvait sembler perdu pour le Gouvernement d’Union, il s’agissait de s’assurer les votes du milieu rural canadien-anglais, et en particulier celui de l’Ontario et des Prairies généralement de couleur libérale.

« La mise en place d’exemptions permit aux agriculteurs de voir de manière plus sereine les semailles et les récoltes de 1918 en conservant leurs fils et leurs travailleurs agricoles. En Ontario, les exemptions accordées encouragèrent les agriculteurs à augmenter leurs surfaces ensemencées au printemps 1918 pour répondre aux besoins de la Grande-Bretagne.1xvii Au Québec également, en février 1918, Le Saint-Laurent s’appuyait sur ces exemptions pour appeler les agriculteurs à produire toujours plus.lxviii Malheureusement, le contexte militaire de 1918, d’abord défavorable aux Alliés avec l’offensive générale allemande du printemps, bouleversa la donne.

« Le 21 mars 1918, les Allemands déferlèrent et percèrent les lignes franco-britanniques. Depuis l’Europe, le ministre canadien des Forces militaires d’outre-mer, A. E. Kemp, s’inquiétait de la baisse du nombre de renforts en provenance du Canada. Le 27 mars 1918, il avait adressé au Ministre de la Milice une dépêche disant que 15 000 hommes de renfort pour l’infanterie et 200 pour la cavalerie devaient quitter l’Angleterre pour le front avant la fin avril. Or, la Loi du Service militaire ne permettait pas de disposer du nombre de recrues suffisant. Le Ministre de la Milice, après les émeutes sanglantes de Québec, répondit le 8 avril que, tout au plus, il pourrait faire parvenir outre-mer 4 900 conscrits en avril ou début mai.lxix

« Face à cette situation, Robert Borden décida d’agir. Le 19 avril 1918, il aborda la question à la Chambre des communes en déposant un arrêté en conseil « projeté » faisant état de la situation urgente qui prévalait sur le front occidental et qui commandait d’annuler les exemptions. Pour le Premier ministre, cette modification de la Loi du Service militaire par un arrêté en conseil, avant même les discussions en Chambre, se justifiait par le fait que les voies législatives ordinaires auraient entrainé des délais que la situation militaire ne permettait pas. Il demandait simplement aux députés d’approuver une résolution reconnaissant l’arrêté en conseil, ce contre quoi s’éleva Wilfrid Laurier, déclarant cette manœuvre non démocratique et contraire aux règles de fonctionnement du Parlement.

« Face à ces deux buts contradictoires poursuivis par le même gouvernement de lever plus d’hommes et de produire toujours plus, buts qui accentuaient la difficulté du Canada à assumer sur deux fronts son effort de guerre au regard de ses ressources mobilisées jusqu’à leur extrême limite, les agriculteurs ne comprenaient plus où étaient les priorités. À l’exemple des récriminations de 1917, Wilfrid Laurier rendit compte de l’incohérence apparente du gouvernement.1xxi Durant toute la durée de la guerre, le gouvernement canadien ne sut jamais comment véritablement gérer cette question de la main-d’œuvre et des agriculteurs au regard de son objectif de fournir des hommes au Corps d’Armée.1xxii Le manque d’une conscription de la force vive canadienne se fit sentir tout au long du premier conflit mondial, au contraire de la guerre de 39-45 qui sut en tirer des leçons avec la Loi de Mobilisation des Ressources Nationales de 1940. En dépit de deux propositions d’amendement de la part de Libéraux issus de provinces agricoles pour conserver les exemptions, la Chambre des communes alla de l’avant.1xxiii Le 20 avril 1918, les exemptions octroyées en 1917 furent annulées. Parmi les jeunes agriculteurs de 20-22 ans, 72 825 avaient obtenu une exemption. De ce nombre, 41 852 furent annulées.1xxiv L’impact de cette mesure se fit sentir sur le nombre de conscrits envoyés outre-mer à partir de l’été 1918 où, en juin, 10 290 furent expédiés en Grande-Bretagne, le nombre passa à 11 158 en juillet et à 13 977 en août… mais à quel prix!1xxv Les agriculteurs retinrent l’annulation des exemptions comme le reniement de la promesse électorale du gouvernement d’Union.1xxvi

« À l’Est, l’United Farmers of Ontario organisa une marche sur Ottawa, en mai 1918. Le Ministre de l’Agriculture du Québec, J.-E. Caron, demanda de faire partie de la délégation.1xxvii Le 14 mai, l’United Farmers of Ontario, pour l’Ontario, et le Comptoir Coopératif de Montréal, pour le Québec1xxviii, rassemblèrent leurs troupes pour rencontrer Robert Borden à Ottawa. La délégation se composait de 5 000 agriculteurs (3 000 Ontariens et 2 000 Québécois). En dépit des tensions culturelles qui avaient marqué les années précédentes autour de l’enrôlement ou de la question des écoles ontariennes en français, les agriculteurs des deux provinces firent entendre une seule et même voix pour dénoncer l’impact de l’annulation des exemptions sur les récoltes de 1918. Pour la plupart des agriculteurs, il s’agissait de leur première expérience de remise en cause ouverte d’une politique prise par le gouvernement fédéral qui était comprise comme allant à l’encontre de leurs intérêts.1xxix

« Les agriculteurs rencontrèrent le Premier ministre Robert Borden, le Ministre fédéral de l’Agriculture, le ministre de la Milice et le président du Conseil privé et vice-président du War Committee. Dans ses mémoires, Robert Borden souligna que l’atmosphère de la rencontre fut extrêmement agressive.1xxx Pour représenter les agriculteurs, quatre personnes, dont J.-E. Caron, prirent la parole. Le premier à s’exprimer fut Manning Doherty de Malton, en Ontario. Il lut la pétition préparée auparavant par la délégation d’agriculteurs au théâtre Russell. Il assura que les agriculteurs n’étaient nullement en rébellion, mais qu’ils désiraient informer le gouvernement sur les conséquences de l’annulation des exemptions pour la production agricole, en plus de souligner leur déception face à la promesse non tenue de les exempter et leur perte de confiance dans le gouvernement. S’ils avaient pu augmenter leurs surfaces ensemencées avant l’annulation des exemptions, ils se disaient à présent confrontés au manque de main-d’œuvre qui allait réduire d’au moins 25% la production agricole canadienne.1xxxi Pour démontrer leur contribution à l’effort de guerre, la pétition rappelait la question de l’incompréhension des agriculteurs à être mobilisés à produire le plus possible en 1915-1917 puis d’en être empêché par la conscription en 1918.1xxxii

Après ces doléances, la réponse de Robert Borden fut que les agriculteurs devaient se plier à la loi à présent que les annulations avaient été votées.1xxxiii Il rappela que le devoir de l’heure du Canada était d’abord envers les hommes au front qui avaient besoin de soutien.1xxxiv Pour les agriculteurs, cette position était un manque de respect à leur égard car Robert Borden ne reconnaissait pas leurs efforts déployés les années précédentes.1xxxv Pour Le Soleil, ils repartirent en colère et peu satisfaits de leur rencontre avec le Premier ministre.1xxxiv

 

« Si le gouvernement ne plia pas, la marche sur Ottawa eut néanmoins des effets. Le 25 mai 1918, des exemptions furent octroyées pour permettre aux conscrits ruraux encore stationnés au Canada de participer aux semailles et aux récoltes de 1918.1xxxvii Au moment des récoltes, le Ministre de la Milice publia un encart dans la presse rurale pour informer les agriculteurs de la possibilité d’obtenir des permissions pour les récoltes de l’été 1918, tout en soulignant que l’envoi des conscrits outre-mer prévalait.1xxxviii Cela permet de remarquer que la question des vivres n’était pas totalement ignorée des autorités militaires et que les hommes politiques canadiens étaient bien conscients de l’impact de la mesure sur les récoltes.1xxxix

« Pour les récoltes canadiennes de 1918, la menace des agriculteurs de diminuer leurs terres cultivées ne fut pas mise à exécution. Au Canada, elles passèrent au contraire de 42 millions d’acres en 1917, à 51 millions d’acres en 1918. En dépit de leurs critiques, les agriculteurs québécois et ontariens avaient rencontré les objectifs assignés par les autorités fédérales et provinciales d’augmenter de plus de 600 000 acres les terres cultivées au Québec, et de 1 million celles en Ontario. Par contre, en dépit de l’augmentation des surfaces cultivées qui avait pu se

« faire avant l’annulation des exemptions, la principale conséquence de la conscription fut que les récoltes de 1918 furent une catastrophe. Au Canada, le blé cultivé, alors même que cette céréale avait été définie comme une « arme » pour soutenir les Alliés, passa de 233 742 850 boisseaux en 1917, à seulement 189 075 350 boisseaux en 1918.xc Et, pour l’après-guerre, le lien de confiance entre les autorités politiques et le monde agricole canadien avait été brisé.

 

Mourad Djebabla (PhD)
Professeur adjoint

Département d’histoire
Collège Militaire Royal du Canada (Kingston)
Revue d’histoire militaire vol13 n°2 printemps 2013
 


References
i David Dupont ed., Une brève histoire de l’agriculture au Québec. De la conquête du sol à la mondialisation (Québec: FIDES, 2009), 39.

ii Henry Borden ed., Robert Laird Borden: His Memoirs, vol. I (Toronto: MacMillan Company, 1938), 457 ; “Les cadeaux des provinces,” Le Peuple, 18 septembre 1914.

iii Eric Kocher-Marboeuf, “Campagnes”, in Inventaire de la Grande Guerre, ed. François Lagrange (Paris: Universalis, 2005), 341.

iv “Le prochain devoir du Canada”, L’Éclaireur, 23 octobre 1914.

v Robert W. Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919” (M. A. diss., University of Waterloo, 1966), 42-4.

vi “Aux cultivateurs”, L’Éclaireur, 13 août 1914.

vii Borden ed., Robert Laird Borden: His Memoirs, 513 et 528.

viii W. R. Young, “Conscription, Rural Depopulation, and the Farmers of Ontario, 1917-19”, Canadian Historical Review 53, 3 (1972): 299.

ix J. Castell Hopkins ed., Canadian Annual Review, 1918 (Toronto: CAR Lted, 1919), 509.

x Nos volontaires sous les armes (Montréal: sans éd., 1916?), 32-5.

xi Lettre de F. S. Murphy, de North Battleford, au ministre de l’Agriculture, 10 août 1918, Fonds R-266, Archives de la Sakatchewan (Regina) (SAB-R).

xii Desmond Morton ed., Billet pour le front. Histoire sociale des volontaires canadiens (1914-1919. (Montréal: Athéna Éditions, 2005), 312.

xiii “Majority of the 65th Will Work in the Harvest”, The saskatoon Phoenix, 14 août 1915.

xiv “Recruiting is Still Active at Country Points”, The saskatoon Phoenix, 14 août 1915.

xv “Will Not Take Over Canadian Wheat Crop”, The Globe, 12 juillet 1915.

xvi “Are Barrie Young Men Unpatriotic?”, Northern Advance, 15 octobre 1914.

xvii “Start Active Campaign to Get More Recruits”, The Saskatoon Phoenix, 12 mai 1915.

xviii “Rural System of Recruiting”, The Ottawa Citizen, 22 octobre 1915.

xix “Recruiting by Train for Grey Battalion”, The Globe, 6 janvier 1916 ; “First Recruiting Train to Run in Grey County”, The Globe, 3 janvier 1916.

xx Robert Rutherdale ed., Hometown Horizons. Local Responses to Canada’s Great War (Canada: UBC Press, 2004), 84-5 ; Barbara M. Wilson ed., Ontario and the First World War. 1914-1918. A Collection of Documents (Toronto: Champlain Society, 1977), xxxv.

xxi Robert Craig Brown ed., Robert Laird Borden. A Biography. Volume II: 1914-1937 (Toronto: MacMillan of Canada, 1980), 63.

xxii Paul Maroney, “Recruiting the Canadian Expeditionary Force in Ontario, 1914-1918” (PhD. diss., McGill University, 1991), p. 21.

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xxvi Wilson ed., Ontario and the First World War, xxxvii.

xxvii “The Annual Address of the President of Saskatchewan Grain Growers’ Association”, The Prairie Farm and Home, 23 février 1916.

xxviii “L’horizon est chargé”, L’Éclaireur, 1er juillet 1915.

xxix “Après la guerre, la famine”, Le Devoir, 2 septembre 1914.

xxx “Les cultivateurs à Ottawa”, 13 mai 1918.

xxxi “Production Campaign is Deterring Men”, The Saskatoon Phoenix, 29 mai 1916.

xxxii J. Castell Hopkins ed., Canadian Annual Review, 1915 (Toronto: CAR Lted, 1916), 216-17.

xxxiii R. Matthew Bray, “'Fighting as an Ally': The English-Canadian Patriotic Response to the Great War”, Canadian Historical Review 61, 2 (1980): 147.

xxxiiv “Rural Recruiting is Still Behind”, The Globe, 27 janvier 1915.

xxxv “Is Rural Ontario Lagging Behind?”, The Globe, 22 janvier 1915.

xxxvi Mourad Djebabla, “La confrontation des civils québécois et ontariens à la Première Guerre mondiale, 1914-1918 : les représentations de la guerre au Québec et en Ontario” (PhD diss., Université du Québec à Montréal, 2008)

xxxvii “The Other Side of the Case”, The Canadian Military Gazette, 22 août 1916.

xxxviii David William Paterson, “Loyalty, Ontario and the First World War” (M.A. diss., McGill Univeristy, 1986), 49.

xxxix Roger Graham ed., Arthur Meighen. A Biography, vol. I (Toronto: Clarke, Irwin and Company Limited, 1968), 193.

xli Mason Wade ed., The French Canadians. 1760-1945 (Toronto: MacMillan Company, 1956), 733.

xlii Total Casualities during 1917, 19 avril 1918, Fonds MG26, Borden Papers, Bibliothèque et Archives Canada (BAC).

xliii Borden ed., Borden ed., Robert Laird Borden: His Memoirs, 698-9.

John English ed., Borden. His Life and World (Toronto: McGraw-Hill Ryerson Limited, 1977), 141.

xliv G. W. L. Nicholson ed., Le Corps Expéditionnaire canadien. 1914-1919 (Ottawa : R. Duhamel – Imp. De la Reine, 1963), 373.

xlv “Food and Fighting”, The Ottawa Citizen, 22 mai 1917.

xlvi Voir par exemple : “Conscription at Last”, The Morning Leader, 19 mai 1917 ; “Des hommes! …”, L’Événement, 29 mai 1917 ; “La conscription”, L’Événement, 4 juin 1917 ; “La conscription”, L’Événement, 12 juin 1917.

xlvii Bernard Dansereau, “Le mouvement ouvrier montréalais et la crise de la conscription 1916-1918” (M.A. diss, Université du Québec à Montréal, 1994) ; Wilson ed., Ontario and the First World War, lv.

x1viii “Les agriculteurs ne sont pas exemptés”, Le Devoir, 11 juillet 1917.

x1ix Nicholson ed., Le Corps Expéditionnaire canadien, 375.

1 Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919”, 88.

1i Nicholson ed., Le Corps Expéditionnaire canadien, 373.

liiJ. Castell Hopkins ed., Canadian Annual Review, 1918 (Toronto: CAR Lted, 1919), 465.

liii Ibid., 467.

liv J. L. Granatstein and J. M. Hitsman ed., Broken Promises. A History of Conscription in Canada (Toronto: Oxford University Press, 1977), 85.

lv Idem.

lvi “Complaint That Bona Fide Farmers Have Been Refused Exemption Answered by Referring Stated Cases to T.M. Molloy”, The Morning Leader, 14 février 1918.

lvii John Herd Thompson ed., The Harvests of War. The Prairie West, 1914-1918 (Toronto: McClelland and Stewart, 1978), 133.

lviii J. Castell Hopkins ed., Canadian Annual Review, 1918 (Toronto: CAR Lted, 1919), 464.

lix Nicholson ed., Le Corps Expéditionnaire canadien, 375.

En définitive, au 11 novembre 1918, au regard des 100 000 conscrits que Borden voulait lever avec la loi, 99 951 furent fournis au Corps Expéditionnaire canadien. De ce nombre, seuls 24 132 servirent sur le front en France.

lx Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919”, 100.

lxi Notes for Addresses Federal Elections, 1917, Fonds 6, William Hearst, Archives Publiques de l’Ontario (APO) ; J. Castell Hopkins, Canadian Annual Review, 1918 (Toronto: CAR Lted, 1919), 464.

lx Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919”, 100.

lxiii J. L. Granatstein and J. M. Hitsman ed., Broken Promises, 75.

lxiv “Agriculturists on Tribunals to Protect Farmers”, The Montreal Daily Star, 4 décembre 1917.

lxv Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919”, 101.

lxvi “Final Appeal Judge Given Rulling on Exemption of Farmers”, Farmer’s Sun, 12 décembre 1917 ; “Exemption is Granted Farmer by Judge Duff”, The Morning Leader, 7 décembre 1917 ; “La terre”, L’Action catholique, 8 janvier 1918.

lxvii Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919”, 111, 114 et 117.

lxviii “Production! Production! Production!”, Le Saint-Laurent, 28 février 1918.

lxix Nicholson ed., Le Corps Expéditionnaire canadien, 377.

lxx Ibid., 379.

lxxi Canada, Official Report of the Debates of the House of Common of the Dominion of Canada. First Session-Thirteenth Parliament. 8-9 George V, 1918, vol . CXXXIII (Ottawa: J de Labroquerie Taché, 1918), 943.

lxxii J. L. Granatstein, “Conscription in the Great War”, in Canada and the First World War, ed. David Mackenzie (Toronto: UTP, 2005), 65.

lxxiii Canada, Compte rendu officiel des débats de la Chambres des communes du Canada, vol. CXXXII (Ottawa: J de Labroquerie Taché, 1918), 1016-17.

lxxiv J. Castell Hopkins ed., Canadian Annual Review, 1918 (Toronto: CAR Lted, 1919), 467.

lxxv Nicholson ed., Le Corps Expéditionnaire canadien, 379.

lxxvi Robert Craig Brown ed., Robert Laird Borden, 133.

lxvii Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919”, 124-6.

lxviii “Les fermiers québécois se joignent aux Ontariens”, Le Devoir, 7 mai 1918 ; “Appel à tous les cultivateurs”, L’Événement, 7 mai 1918 ; “Appel à tous les cultivateurs”, Le Peuple, 10 mai 1918.

lxxix Kerry A. Badgley, Ringing in the Common Love of Good. The United Farmers of Ontario, 1914-1926 (Montreal: McGill University-Queen’s University Press, 2000), 57.

lxxx Borden ed., Robert Laird Borden: His Memoirs, 802.

lxxxi Trowbridge, “War Time Rural Discontent and the Rise of the United Farmers of Ontario. 1914-1919”, 126-38.

lxxxii “La requête des fermiers du pays”, Le Soleil, 15 mai 1918.

lxxxiii “Farmers Told No Relaxation of Military Service Possible”, The Globe, 15 mai 1918.

lxxxiv “Protestation des fermiers”, Le Patriote de l’Ouest, 15 mai 1918 ; “M. Borden désappointe les fermiers”, Le Devoir, 15 mai 1918.

lxxxv “La production supplantée par le soldat”, Le Colon, 16 mai 1918.

lxxxvi “Les fermiers n’ont pas de succès à Ottawa”, Le Soleil, 15 mai 1918.

lxxvii “Des conscrits libérés pour l’agriculture”, Le Soleil, 25 avril 1918.

lxxviii “Public Notice”, The Wilkie Press, 27 juin 1918.

lxxxix J. Castell Hopkins ed., Canadian Annual Review, 1918 (Toronto: CAR Lted, 1919), 465.

xc Canada, Minister of Trade and Commerce, The Canada Year Book, 1918 (Ottawa: J. de L. Taché, 1919), xiii.




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