Constant Doyon

Fait inhabituel à cette époque, Doyon a rédigé en français une grande partie de sa correspondance d'aumônier militaire.


DOYON, CONSTANT (baptisé Paul-Victor-Emmanuel), dominicain, missionnaire et aumônier militaire, né le 27 janvier 1875 à Saint-Guillaume, Québec, fils de Charles Doyon, cultivateur, et d'Odile Chaussé ; décédé le 18 octobre 1927 à Saint-Michel-des-Saints, Québec.

Après ses études classiques aux séminaires de Saint-Hyacinthe (1887–1893) et de Nicolet (1893–1896), Paul-Victor-Emmanuel Doyon entre chez les dominicains en 1896, sous le prénom de Constant. Il fait son noviciat à Saint-Hyacinthe et ses études au couvent des dominicains à Ottawa, où il est ordonné prêtre le 31 mai 1901. Il séjourne en France en 1902 et 1903, avant de se voir confier la responsabilité administrative du Rosaire, du Rosaire pour tous et du Rosary for everyone – revues dominicaines de Saint-Hyacinthe – jusqu'en 1907. Il devient ensuite missionnaire prédicateur et consacre beaucoup d'énergie à la cause de la tempérance. À l'occasion de la Grande Guerre, il sert dans le Corps expéditionnaire canadien (de 1915 à 1918), puis reprendra sa tâche de missionnaire.

Doyon joint les rangs du 22e bataillon d'infanterie [V. Henri Chassé] comme aumônier le 17 février 1915, avec le grade de capitaine honoraire. Le 22e bataillon sera la seule unité d'infanterie canadienne-française à voir le feu pendant la Première Guerre mondiale. Doyon s'enrôle à l'âge de 40 ans. Il succède au major Philippe-Henri-Duperron Casgrain. Pendant le passage du 22e bataillon en Nouvelle-Écosse, au printemps de 1915, il contribue à lui assurer l'affection et l'estime de la population d'Amherst en créant une conférence de la Société de Saint-Vincent-de-Paul parmi les membres du régiment. Le colonel Frédéric-Mondelet Gaudet*, premier commandant du bataillon, le félicite « de cette œuvre éminente de charité discrète et bienfaisante ». Doyon quitte le Canada pour outre-mer avec son unité le 20 mai 1915. En Angleterre, il est affecté au quartier général de la 5e brigade de la 2e division canadienne le 8 septembre 1915, une semaine avant de traverser en France. Au front, il assume une tâche immense parce qu'il est pendant de longs mois le seul prêtre catholique à servir au sein de cette 5e brigade, composée d'un nombre de soldats catholiques beaucoup plus élevé que la moyenne à cause de la présence, en son sein, du 22e bataillon, unité canadienne-française. Il s'y fait remarquer par son ardeur au travail, son dévouement et sa fidélité à son devoir. Le 13 février 1917, il est muté au quartier général de la Division d'instruction canadienne, à Shorncliffe, en Angleterre. Mis à part un séjour de quatre mois au Canada en 1917, il travaille jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale auprès de Canadiens français en Angleterre, soit pour le 10e bataillon de réserve, le 150e bataillon d'infanterie et le camp d'isolement de Frensham Pond. Il revient définitivement au Canada le 18 décembre 1918, après plus de trois ans de service outre-mer. Il est nommé aumônier honoraire du régiment de Saint-Hyacinthe le 29 mars 1920.

Doyon était un homme dur à la tâche : dès qu'il a été rappelé en Angleterre en février 1917, il a rêvé de retourner au front. Le 1er mars 1918, il a demandé d'être nommé aumônier auprès des militaires canadiens-français qui servaient dans des « unités anglo-protestantes » au front. Attaché au Canada français, il parlait, dans une lettre, des « tristesses des jours que nous vivons, nous, les Canadiens-Français [outre-mer] ». Les soldats canadiens-français étaient les seuls à parler français au sein des forces armées britanniques, auxquelles était intégré le Corps expéditionnaire canadien. Ils formaient aussi une entité catholique parmi un ensemble avant tout protestant. Fait inhabituel à cette époque, Doyon a rédigé en français une grande partie de sa correspondance d'aumônier militaire. Il était fier d'être l'aumônier du 22e bataillon. Quelques mois après la bataille de Courcelette, en France, en septembre 1916, il a écrit : « Le Canada français a joué une part grande et glorieuse dans la guerre. »

Constant Doyon meurt le 18 octobre 1927, à l'âge de 52 ans. Il a droit à des funérailles militaires, célébrées à Saint-Hyacinthe. Il s'est dévoué jusqu'à la fin, en dépit d'un état de santé devenu précaire à la suite d'une forte attaque de paralysie qui l'a affecté pendant les trois dernières années de sa vie. Pour son supérieur provincial, Pie-Marie Béliveau, il avait une « âme de feu » ; « pendant vingt ans, a écrit Béliveau après sa mort, il se donna à sa belle tâche [de missionnaire] d'une telle fougue que les plus courageux ne savaient pas toujours le suivre ».

—Texte par Jean-Pierre Gagnon, “«DOYON, CONSTANT (baptisé Paul-Victor-Emmanuel)», dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 févr. 2015. Pour cette bibliographie et d'autres, visiter le Dictionnaire biographique du Canada.