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Histoire au travail: Alessandro Cassa

Histoire au travail: Alessandro Cassa
Crédit photo : Guylaine Beaudoin

Nom : Alessandro Cassa
Employeur : Pointe-du-Buisson / Musée québécois d'archéologie
Localité : Beauharnois
Emploi occupé : Directeur général
Nombre d’années d’implication : 4 ans au Musée et 14 ans en culture

 

Comment décririez-vous votre travail?

Mon travail de Directeur général de Pointe-du-Buisson, Musée québécois d'archéologie pourrait se résumer ainsi : une excellente façon de mettre à profit mes expertises et mes passions. Mais c'est également une voie privilégiée pour travailler dans le domaine de la culture et du patrimoine. Ce privilège est également une responsabilité, celle de m'assurer de la bonne mise en valeur d'un site exceptionnel qu'est Pointe-du-Buisson.

Mon travail de gestionnaire ne se limite pas à l'administration. Il me permet de toucher à plusieurs facettes et projets du Musée. Formé comme architecte paysagiste spécialisé en mise en valeur du patrimoine, j'ai été formé pour inventer, trouver des solutions, innover et faire ressortir l’essence d'un lieu ou d’un projet. Des qualités qui m’ont valu l'honneur d'être récipiendaire du Prix Relève 2010 de la Société des musées québécois.

Comme Directeur général je dois veiller au bon fonctionnement du Musée, et à l'amélioration constante de l'expérience offerte aux visiteurs. Ce qui s'effectue sur un site exceptionnel. En effet, situé à Beauharnois, le Musée québécois d’archéologie a pour mission de faire découvrir à la population locale de même qu’au public québécois, la science de l’archéologie, tout en préservant, documentant et mettant en valeur, le patrimoine archéologique du site. Le Musée fait donc découvrir toute l’année, par ses activités et installations muséales, les coulisses de l’archéologie et de son site préhistorique. Un travail passionnant.

En plus d'être dans l'action au quotidien (soit avec les visiteurs, soit avec l'administration de cet organisme à but non lucratif), je dois continuellement être au diapason du Musée et de la muséologie en général. Il est primordial de consolider nos actions ou parfois, d'inventer de nouvelles façons de faire… et bien sûr de constamment s'assurer que nous bénéficions des ressources humaines, financières et physiques pour réaliser ces projets. Qui a dit que la vie d'un musée était lente et sans dynamisme ?

La pression d'un tel emploi est forte, car ce haut lieu de savoir que je gère est un espace composé de 17 sites archéologiques à protéger et à mettre en valeur, où ont été découverts à ce jour plus de deux millions d’objets. Des artefacts qui composent notre collection et qui permettent de documenter et de mieux comprendre les populations amérindiennes et euroquébécoises qui ont occupé le territoire et le sud-ouest du Québec. Cette collection est toujours activement consultée par des chercheurs des quatre coins de la province. Les archéologues l’ont d'ailleurs utilisée pour mettre en place la chronologie de la région de Montréal, pour les six derniers millénaires. Fondé en 1986, Pointe-du-Buisson/Musée québécois d’archéologie est reconnu chez les professionnels pour sa collection archéologique de référence, l'une des plus importantes du genre Québec. De 1977 à 2000, il fut le site de la première école de fouilles accréditée au Québec, une école de terrain de l’Université de Montréal. C'est donc un précieux joyau québécois que j'ai la chance de diriger.

D'un point de vue archéologique, le Musée est situé sur un ancien lieu de villégiature actif entre 1850 et 1965, marqué au 19e siècle, par la venue de bourgeois britanniques qui furent enlevés par des patriotes. Un lieu, qui fut également décrit dans les carnets de voyage de personnalités historiques, tel Frontenac. Le site accueillait alors, depuis des milliers d'années, des populations amérindiennes. Ces humains, au fil de 5000 ans d'occupation, ont laissé sur cette pointe de terre des traces de leur passage (objets du quotidien et outils) analysées et dévoilées par les archéologues.

Aujourd’hui, le Musée est l'un des leaders québécois en archéologie publique, un lieu phare en recherche, en enseignement et en diffusion. Un grand Musée qui fait découvrir et partager 5000 ans d'histoire. Et les fouilles s’y poursuivent.

Que préférez-vous dans votre emploi?

J'ai le privilège d'occuper un poste qui offre une mosaïque de possibilités et cette diversité d'action est certainement ce que je préfère. Je peux mettre à profit, tant mes compétences de gestionnaire, que ma créativité, le tout au service de l'histoire, du patrimoine et de l'archéologie. Je suis donc en constante réflexion sur les nouveaux défis à relever et sur l'avancement de nos façons de faire, de même qu'en réflexion pour proposer des solutions permettant de demeurer près du public.

De plus, par la nature de l'organisme que je dirige, je peux également être impliqué dans l'ensemble des étapes de nos projets, ce qui est enrichissant et très stimulant. Je me dois également de mentionner que je suis entouré d'une équipe d'employés hors du commun, de membres de Conseil d'administration impliqués, curieux et soucieux de la réussite des projets du Musée, de même que de partenaires de choix, dont la Ville de Beauharnois et le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec. Ceci facilite mon travail de gestionnaire, en plus de permettre un plus grand déploiement de notre institution muséale et un plus grand rayonnement de notre collection archéologique de référence.

Quel est le défi le plus important rencontré dans l’exercice de votre profession?

Gérer un organisme à but non lucratif et une institution muséale est un défi en soi. Je me dois de toujours m'assurer d'œuvrer sur deux fronts en parallèle : démocratisation de la culture et du savoir, et financement de l'institution.

Tout d'abord, je dois m'assurer de toujours démocratiser le savoir archéologique et de rendre accessible la collection du Musée au plus grand nombre. Donc de m'assurer que dans nos interventions, nous puissions bien vulgariser l'information pour sortir du cadre élitiste. Il nous faut à tout point de vue, offrir au grand public la chance de partager les connaissances du Musée, de même que notre passion.

Parallèlement, il me faut constamment œuvrer au financement de l'institution, en plus de développer de nouveaux partenariats et de consolider nos acquis. Il nous faut les moyens de nos ambitions et cette responsabilité m'incombe. Le défi est donc de conserver cet équilibre entre le développement, la diffusion et le financement. Et nous avons su trouver cet équilibre au Musée. Car une vision d'avenir permet de conserver cet équilibre, traçant une ligne directrice sur laquelle appuyer nos choix et nos actions.

Pour quelles raisons vous êtes-vous intéressé à l’histoire?

Depuis mon passage en différentes MRC du Québec, au Réseau ARCHÉO-QUÉBEC, au Musée McCord puis enfin à Pointe-du-Buisson / Musée québécois d’archéologie, le patrimoine et l'histoire ont toujours été au cœur de mes préoccupations.

Je ne saurais dire pourquoi : c'est une façon de voir les choses, un réflexe, bien plus qu'un choix délibéré, je crois. L'histoire fait tout simplement partie de moi et de mon éducation. Comment se tourner vers l'avenir ? En s'appuyant sur son passé, en le comprenant et l'utilisant pour se propulser vers le futur. Pour moi, le passé et l'histoire permettent de mieux se connaitre comme société et de faire preuve d'humilité face aux générations passées… ce qui nous donne par contre une responsabilité pour les générations futures. L'archéologie était donc pour moi, un domaine tout indiqué.

D’être maintenant à la tête d’un Musée portant sur la discipline de l'archéologie et sur ses découvertes, constitue une suite logique qui répond à mes aspirations. Je savais lors de ma formation universitaire que je n’aurais pas un plan de carrière habituel ou conforme au métier d’architecte paysagiste. Volonté d'ouvrir les champs d'intervention ? Domaines d’intérêts trop différents ? Je ne saurais dire. Mais le patrimoine et la culture furent toujours en coulisse de mes projets. C’est en fait une suite d’événements et de propositions qui m’ont mené où je suis aujourd’hui. Un poste où j’utilise contre toutes attentes, pratiquement la totalité de mes acquis malgré mon profil éclectique, et ce au profit du patrimoine archéologique.

Pourquoi éclectique ? Parce qu'en parallèle de mon poste de Directeur général je suis tuteur à l'université à distance de l'Université du Québec à Montréal (TÉLUQ) en aménagement du territoire et en environnement. Et parce que je suis également auteur de deux romans (La diva & Un dernier opéra publiés chez Guy St-Jean Éditeur) deux récits sur une cantatrice canadienne fictive, écrits à partir de clichés d'archives du grand photographe William Notman. Ses clichés m'ayant ramené au siècle dernier où se déroulent mes récits. Et pour terminer cet amalgame un peu particulier, je suis réalisateur de 2 courts métrages (DOUBLE ESPRESSO et JRAUOMESN) qui ont tous deux étés présentés au Festival de Cannes dans le cadre du Short Film Corner. Voici donc des domaines diamétralement opposés les uns aux autres, mais qui composent mon profil éclectique.

Quelle est la réalisation dont vous êtes le plus fière?

Ce n'est pas d'un projet en particulier dont je suis le plus fier, mais bien d'avoir su mettre à profit mon profil atypique au service de l'archéologie, par une vision et une ligne directrice d'intervention.

Ceci m'aura permis en très peu de temps de positionner notre institution dans le paysage culturel, touristique et muséal québécois et de lui permettre de se déployer. Habité d’une vision à long terme mobilisatrice pour l’institution, j'ai mis en œuvre un plan d’intervention ambitieux en tenant compte des réalités financières et humaines de l’institution et du potentiel de développement du site. Un plan établi selon les aspirations et besoins de l'équipe, et développé avec les partenaires et les membres de mon Conseil d'administration.

Ce plan d'intervention comprenait plusieurs éléments. Et depuis mon entrée en poste il y a un peu plus trois ans, plusieurs de ses composantes ont été réalisées grâce au savoir-faire de mon équipe et de nos partenaires. Notons entre autres une consolidation des ressources humaines, une nouvelle exposition permanente, des bâtiments rénovés, de nouvelles installations en forêt, un retour à la mission fondamentale du site, une ouverture à l'année et une nouvelle image de marque.

Réalisation moins visible, je travaille également au développement du sentiment d’appartenance régional et au développement du tourisme. Toujours à l'affut de meilleure façon de faire, de nouveau projet à développer, ou de nouveaux défis à relever. Je crois oeuvrer avec rigueur et audace auprès des acteurs en présence afin de livrer un Musée mobilisateur, renouvelé et accueillant.

L'expérience offerte aux visiteurs vise une approche de diffusion et de sensibilisation. Ceci s'exprime par l'offre de visites scolaires et de groupes, par la participation du public à des fouilles simulées et authentiques (les fouilles authentiques étant initiées au Musée en 1996, pour la première fois au Québec), par des camps de jour et de vacances en archéologie et bien sûr par nos expositions temporaires et notre exposition permanente Fouilles 100% publiques. Cette dernière s'est d'ailleurs mérité une mention d'honneur dans le cadre des Prix Histoire Canada 2011. Le Musée propose également des bornes numériques et des vidéos sur les coulisses et les 4 saisons de l’archéologie, ainsi qu'une projection multimédia sur les 5000 ans d'occupations du site.

Toutes ces actions ont pour but de permettre la découverte du travail des archéologues, soit en les côtoyant, soit en participant à des visites guidées, soit en participant aux activités de notre programmation culturelle. Mais toujours le visiteur entre dans les coulisses du Musée et fait partie du Musée… et de l'histoire.

Bien sûr, je fus très touché par un événement marquant pour le Musée. Le 25 janvier 2011, le Musée, qui entamait les célébrations de ses 25 ans, innovait en ouvrant ses portes aux visiteurs à l'année et à peine quelques semaines après, en février 2011 le Sénateur Pierre Claude Nolin, représentant du ministre fédéral Peter Kent, se déplaçait au Musée pour nommer officiellement Pointe-du-Buisson, Lieu d’importance historique nationale. Le Musée allait donc maintenant être reconnu à travers le Canada, par la Commission des lieux et monuments historiques.

L'une des missions du Musée étant de redonner aux résidents leur patrimoine local, et de leur permettre également de partager leur histoire avec le reste du Québec et du Canada, nous ne pouvions demander un plus beau cadeau pour les 25 ans de l'institution.

Quel conseil donneriez-vous à un étudiant intéressé à exercer le même emploi que vous?

Certainement de suivre sa vision et son instinct pour se mettre au service des autres et de sa collectivité. De ne pas se centrer sur soi… mais bien d'agir pour la cause, si je puis dire. C'est du moins ma méthodologie.

Bien sûr, un Directeur général se doit avant tout d’exercer un certain leadership. C’est en fait par une vision à long terme, par des solutions inhabituelles et créatives et par l’apport de nouveaux projets, que l'on peut réussir à conserver ce leadership au sein d'une équipe, bien au-delà du titre. Et ce, tout en se démarquant de ses pairs, en motivant ses employés et en façonnant sa propre expertise professionnelle.

Je crois qu’il y a toujours de la place pour les idées nouvelles, le savoir-faire et la vision. Des qualités que mes professeurs et emplois passés m’ont inculquées. Des qualités devenues des valeurs et des caractéristiques chez moi. Cette base, reçue dans le cadre de mes études pourrait être mise à profit, selon moi, dans tous les domaines et dans toutes les sphères où la créativité peut apporter des solutions différentes. Je crois donc qu’il y a beaucoup d’avenir pour les futures carrières atypiques.

Personnellement je tente de conserver prioritairement deux qualités : être visionnaire et être mobilisateur. Je m'inspire en fait continuellement de cette simple maxime : comment construire son avenir ? Simplement sur les racines de son passé.

 

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