Les couturières, ces oubliées?
Dans cet article, l’historienne Suzanne Gousse s’intéresse aux couturières, une communauté de femmes peu étudiées dans l’historiographie de la Nouvelle-France. En se penchant sur ce groupe particulier, Gousse souhaite présenter un exemple de relative autonomie féminine au XVIIIe siècle. Elle fait la démonstration que tout comme les veuves ou les marchandes – deux groupes de femmes déjà bien documentés dans l’Ancien Régime – les couturières avaient elles aussi une certaine indépendance.
S'inscrivant dans une perspective d'histoire des femmes, Gousse s’intéresse à ce groupe pour leur clientèle et aussi pour la diversité du point de vue des origines et de la pratique du métier.
Plusieurs questions alimentent la réflexion de l’historienne. « Quelles circonstances conduisent à l’adoption de ce métier dans un contexte d’absence de communautés de métiers ? D’où les couturières montréalaises viennent-elles et comment apprennent-elles leur art ? De quels réseaux font-elles partie ? Quels sont les rouages du métier ? Enfin, y a-t-il des indices d’une certaine liberté d’action même pour les femmes mariées qui sont considérées mineur devant la loi ? »
L’historienne utilise l’exemple particulier de Marie Catherine Demers Dessermon, une montréalaise qui exerça le métier de couturière.
Ce qui distinguait Marie Catherine Demers Dessermon des autres couturières de l’époque, c’est qu’à un tournant de sa vie, elle décida de se dédier aux soins des pauvres. Elle participa à la fondation de la communauté des Sœurs Grises à Montréal. Avec Marguerite d’Youville, elle prononça ses vœux de chasteté et d’obéissance.
Tout laisse à croire que les religieuses finançaient leur institution – l’hôpital général – grâce entre autres à des travaux de couture. Il semblerait aussi qu’elles fournissaient du travail à des femmes qui réalisaient des travaux de couture grossiers ou délicats comme sous-traitantes.
Pour Suzanne Gousse, l’exemple de Marie Catherine Demers Dessermon est particulier non seulement à cause de la profession qu’elle exerçait, mais aussi pour son action à soulager la misère de pauvres pendant près de 50 ans.
«De couturière à Soeur Grise. Le parcours inhabituel de Marie Catherine Demers Dessermon dans le Montréal du XVIIIe siècle» est un article publié à l’automne 2009 dans Cahier d’histoire. Suzanne Gousse est candidate au doctorat au département d’histoire de l’Université de Montréal.